La cohĂ©sion sociale est essentielle Ă  la sĂ©curitĂ© d’une communautĂ© tout comme le fait qu’une communautĂ© soit en sĂ©curitĂ© peut contribuer Ă  amĂ©liorer la cohĂ©sion sociale entre ses membres. À ce titre, elle est un Ă©lĂ©ment central d’une des conditions favorisant la sĂ©curitĂ© d’une communautĂ©, soit un climat de cohĂ©sion, de paix sociale et d’équitĂ© favorisant les

28 juillet 2012 6 28 /07 /juillet /2012 2047 Pour Claude GuĂ©ant, le texte que prĂ©pare Manuel Valls sur les critĂšres de la rĂ©gularisation des Ă©trangers en situation clandestine aura pour consĂ©quence de crĂ©er des droits pour des personnes qui ont violĂ© la loi». INTERVIEW - Pour l'ancien ministre de l'IntĂ©rieur Claude GuĂ©ant, la ligne politique du gouvernement se rĂ©sume Ă  annuler ce qui a Ă©tĂ© fait sous Sarkozy. LE FIGARO. - Comment rĂ©agissez-vous aux dĂ©clarations de votre successeur au ministĂšre de l'IntĂ©rieur, Manuel Valls? Claude GUÉANT. - La ligne de la politique mise en Ɠuvre par le gouvernement Ayrault semble se rĂ©sumer Ă  annuler ce qui a Ă©tĂ© fait sous la prĂ©sidence de Nicolas Sarkozy, fĂ»t-ce au dĂ©triment des intĂ©rĂȘts fondamentaux de notre pays. Nous avons pu le constater, ces deux derniĂšres semaines, en matiĂšre Ă©conomique les mesures adoptĂ©es dans le collectif budgĂ©taire n'ont pour rĂ©sultat que de diminuer les revenus des Français et de ré­duire la compĂ©titivitĂ© des entreprises, alors qu'au contraire il conviendrait de stimuler et la consommation et la productivitĂ© française. En ce qui concerne l'immigration, et singuliĂšrement le volet naturalisation, les mesures que prĂ©conise Manuel Valls sont de na­ture Ă  porter gravement atteinte Ă  la cohĂ©sion sociale, alors mĂȘme que le gouvernement socialiste lui-mĂȘme ne cesse de proclamer sa volontĂ© de rassembler le pays. Dans quel Ă©tat d'esprit aviez-vous Ă©tabli en 2011 de nouveaux critĂšres d'accĂšs Ă  la naturalisation pour les Ă©trangers? Notre politique avait un objet et un seul faire en sorte que les naturalisations soient des succĂšs et que les nouveaux Français soient reconnus sans aucune rĂ©serve comme des Français Ă  part entiĂšre qu'ils sont. Devenir français, ce n'est pas le dĂ©but d'un parcours, c'est l'aboutissement d'une intĂ©gration, comme d'ailleurs Manuel Valls le reconnaĂźt. Nous avions Ă©tabli trois nouvelles conditions la premiĂšre, en vigueur depuis le 1er janvier 2012, faire preuve d'un minimum de connaissance de la langue française. C'est le niveau correspondant Ă  la fin de la scolaritĂ© obligatoire la troisiĂšme. C'est le critĂšre retenu par l'ensemble des pays europĂ©ens et d'autres comme le Canada. La deuxiĂšme mesure, applicable depuis le 1er juillet, consistait Ă  demander une connaissance minimale de notre histoire, de nos institutions, de notre culture, sous forme d'un QCM questionnaire Ă  choix multiple. LĂ  encore, cela me semble absolument normal et de bon sens qu'un Français connaisse les grands principes de la sociĂ©tĂ© dans laquelle il vit. Ce QCM a Ă©tĂ© testĂ© pendant plusieurs mois et il ne correspond en rien Ă  la description qu'en fait Manuel Valls. Enfin, il y a une troi­siĂšme mesure, qui consistait Ă  faire signer par les nouveaux Français une charte des droits et des devoirs» des citoyens, lors d'un entretien d'assimilation. La remise en cause de ces mesures est-elle le signal d'un assouplissement de la politique d'immigration? Je serais trĂšs choquĂ© que le gouvernement veuille revenir sur ces trois me­sures qui n'ont pour objet que de garantir la cohĂ©sion de notre pays. Je crois malheureusement que c'est un signal parmi beaucoup d'autres. Au SĂ©nat, Manuel Valls a confirmĂ© qu'il allait revoir les critĂšres de la rĂ©gularisation des Ă©trangers en situation clandestine. Le texte que prĂ©pare le ministre aura Ă  l'Ă©vidence pour consĂ©quence de crĂ©er des droits pour des personnes qui ont violĂ© la loi. Ce qui pose problĂšme. Il indique qu'un des critĂšres pourrait ĂȘtre celui de la scolarisation des enfants. Or tous les enfants Ă©trangers, quelle que soit la rĂ©gularitĂ© du sĂ©jour de leurs parents, sont accueillis dans nos Ă©coles. Cela signifie qu'il suffirait d'avoir des enfants pour avoir un droit dĂ©finitif au sĂ©jour. Manuel Valls dit aussi que le fait de travailler clandestinement pourrait donner droit au sĂ©jour. Autant dire que plus on est irrĂ©gulier, plus on enfreint la loi, plus on aurait droit au sĂ©jour. Je laisse les Français juger! J'ajoute que la crĂ©ation du forfait de 30 euros pour l'accĂšs Ă  l'aide mĂ©dicale d'État AME avait pour objectif de mettre fin Ă  une anomalie le plus pauvre des Français doit cotiser un minimum alors qu'un Ă©tranger clandestin pouvait ĂȘtre soignĂ© gratuitement. Le gouvernement remet en vigueur cette injustice. Quelle idĂ©ologie sous-tend ce changement de cap? Le trait commun de toutes ces mesures, on le trouve dans les publications de l'association Terra Nova, qui sert de laboratoire d'idĂ©es au PS. Ces publications disent que la classe ouvriĂšre est devenue ringarde et conservatrice et qu'elle doit ĂȘtre, en tant que clientĂšle Ă©lectorale, abandonnĂ©e par la gauche. Avec un total cynisme, ces publications affirment que puisque les personnes issues de l'immigration votent Ă  75% pour la gauche, la nouvelle clientĂšle Ă©lectorale Ă  cultiver pour le PS doit dĂ©sormais ĂȘtre celle des personnes issues de l'immigration. Par consĂ©quent, il faut augmenter l'immigration! La droite n'est pas contre l'immigration, mais elle veut maĂźtriser les flux migratoires afin que ceux qui sont lĂ©galement accueillis dans notre pays s'y sentent Ă  l'aise et y rĂ©ussissent. En revanche, favoriser une immigration incontrĂŽlĂ©e pour des motifs politiciens prĂ©sente de grands dangers pour la cohĂ©sion sociale et pour la prĂ©servation des valeurs de la RĂ©pu­blique. Published by Franck GUIOT

expliquer comment la cohĂ©sion sociale peut ĂȘtre fragilisĂ©e par les inĂ©galitĂ©s sociales et territoriales. À la fin de cette activitĂ©, les Ă©lĂšves ont acquis tous les Ă©lĂ©ments qui forment la capacitĂ©. La construction de la capacitĂ© peut avoir Ă©tĂ© engagĂ©e Ă  d’autres moments de la progression ; ce temps-ci en finalise le processus. Elle pourra ensuite ĂȘtre mobilisĂ©e
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\n \n comment les inégalités sociales portent atteinte à la cohésion sociale
Lestravaux sur l’incidence de la COVID-19 sur la confiance et sur les inĂ©galitĂ©s sociales seront finalisĂ©s, tandis que des recherches dĂ©buteront en ce qui concerne les consĂ©quences sur la cohĂ©sion sociale et le mĂ©contentement dans l’UE, y compris les effets des instruments de soutien mis en place dans les États membres. Eurofound examinera les
L`Orient-Le Jour Comment les inĂ©galitĂ©s sociales et L'Orient-Le Jour Comment les inĂ©galitĂ©s sociales et spatiales ... À LA UNE ECLAIRAGE - SYRIE Comment les inĂ©galitĂ©s sociales et spatiales alimentent la rĂ©volte anti-Assad vendredi, novembre 25, 2011 Manifestation pro-Assad Ă  Alep. "Damas est devenue trop puissante, et Bachar, fidĂšle Ă  la politique paternelle de diviser pour rĂ©gner, s'efforce de rĂ©activer Alep pour concurrencer la capitale", explique Fabrice Balanche. SANA/HO/AFP "Le retournement de l'espace syrien" Fabrice Balanche, chercheur et spĂ©cialiste de la Syrie, dĂ©crypte la crise en cours. Dans un rapport publiĂ© rĂ©cemment, Fabrice Balanche, directeur du Groupe de recherches et d'Ă©tudes sur la MĂ©diterranĂ©e et le Moyen-Orient, passe en revue les politiques socioĂ©conomiques du parti Bass, au pouvoir depuis prĂšs de 50 ans en Syrie. Une Ă©tude qui permet de mettre en Ă©vidence les racines sociales de la fronde populaire qui menace, depuis plus de neuf mois, le rĂ©gime et le clan Assad. "La Syrie est depuis plus de vingt ans dans une phase de transition Ă©conomique lente et hĂ©sitante, Ă©crit l'expert dans son document intitulĂ© +Le retournement de l'espace syrien+. Il est pratiquement sĂ»r que le pays ne reviendra plus Ă  l'Ă©conomie dirigiste des annĂ©es 70-80, mais elle reste bridĂ©e par la bureaucratie et des oligopoles constituĂ©s autour de quelques caciques du rĂ©gime, tel Rami Makhlouf", le cousin du prĂ©sident Bachar al-Assad. "Les ressources en hydrocarbures sont Ă  peine suffisantes pour la consommation domestique, l'autosuffisance alimentaire est remise en cause par le manque d'eau, l'industrie syrienne n'est pas compĂ©titive, le tourisme, prĂ©sentĂ© comme l'avenir de la Syrie, ne peut dĂ©coller en raison de la mainmise de quelques barons du rĂ©gime et bien sĂ»r de l'instabilitĂ© politique, explique le gĂ©ographe français. Dans ce contexte Ă©conomique et social, les dĂ©sĂ©quilibres territoriaux s'exacerbent". La "guerre" des classes Pour mieux comprendre ce phĂ©nomĂšne, un retour dans le temps s'impose. Le 8 mars 1963, "un coup d'Etat militaire a portĂ© Ă  la tĂȘte du pays un groupe d'officiers 1 sur 4 25/11/11 1152 L'Orient-Le Jour Comment les inĂ©galitĂ©s sociales et spatiales ... baasistes dont la majoritĂ© est issue de la petite bourgeoisie rurale des provinces pĂ©riphĂ©riques. La plupart d'entre eux appartiennent Ă  des groupes de confessions minoritaires alaouite, druze, chrĂ©tien et ismaĂ©lite. Ils se sont emparĂ©s d'un pouvoir monopolisĂ© depuis l'indĂ©pendance par la haute bourgeoisie qui possĂ©dait tout la richesse fonciĂšre, le grand commerce avec l'Ă©tranger et les industries naissantes. Aussi, ces secteurs Ă©conomiques furent-ils la cible immĂ©diate du nouveau rĂ©gime, dĂ©cidĂ© Ă  rĂ©duire le pouvoir des classes qu'ils jugeaient concurrent du leur". DĂšs son arrivĂ©e au pouvoir, le rĂ©gime baasiste concentre donc ses efforts sur le monde rural, qui "reprĂ©sentait les trois quarts de la population syrienne", et lance un rĂ©forme agraire ambitieuse "les grands domaines agricoles sont dĂ©mantelĂ©s et les terres distribuĂ©es aux paysans". La rĂ©gion cĂŽtiĂšre, fief de la communautĂ© alaouite, est naturellement elle aussi favorisĂ©e. "L'Etat, au prĂ©texte de sa vocation maritime, y implante plusieurs grandes entreprises, comptant encore aujourd'hui plus de 20% des emplois du secteur public industriel alors que la rĂ©gion rassemble moins de 10% de la population syrienne". Mais "dans tous les amĂ©nagements, les logiques clientĂ©listes, communautaire et/ou politiques priment au dĂ©triment de la rationalitĂ© Ă©conomique", note M. Balanche, auteur de "La rĂ©gion alaouite et le pouvoir syrien" Karthala, 2006. Selon lui, le succĂšs fragile de la politique de dĂ©veloppement du rĂ©gime baasiste "s'achĂšve sur un constat d'Ă©chec" dans les annĂ©es 80, suite la crise Ă©conomique provoquĂ©e par la chute de l'URSS, alliĂ© de la Syrie, et l'arrĂȘt des aides financiĂšres des Etats arabes pĂ©troliers. De 1973 Ă  1986, la Syrie recevait une aide annuelle comprise en 500 millions et 2 milliards de dollars, soit plus du quart de son PIB, des pĂ©tromonarchies du Golfe et cumulait plus de 10 milliards de dettes Ă  l'Ă©gard de l'Union soviĂ©tique. Selon M. Balanche, la crise des annĂ©es 80 a mis en Ă©vidence "l'absence de rentabilitĂ© Ă©conomique d'un secteur public industriel, utilisĂ© avant tout Ă  des fins politiques." L'ouverture Ă©conomique et ses consĂ©quences Face au risque d'une explosion sociale inĂ©vitable ñ€“ en raison notamment d'une dĂ©mographie galopante -, Hafez al-Assad 1971-2000 dĂ©cide de "libĂ©rer l'Ă©conomie syrienne au dĂ©but des annĂ©es 90". Cette politique sera renforcĂ©e Ă  l'arrivĂ©e de son fils Bachar, dix ans plus tard. "Depuis qu'il a succĂ©dĂ© Ă  son pĂšre, en juin 2000, Bachar al-Assad a donnĂ© un nouveau souffle au processus de libĂ©ralisation Ă©conomique, souligne M. Balanche, mais lĂ  encore, sans remettre en cause les fondamentaux de la pĂ©riode prĂ©cĂ©dente rĂ©forme agraire, secteur public industriel, administration plĂ©thorique, etc. En revanche, il a interrompu la coĂ»teuse politique de dĂ©veloppement des rĂ©gions pĂ©riphĂ©riques". RĂ©sultat les migrations intĂ©rieures autour des quatre principales mĂ©tropoles Alep, Hama, Homs et Damas reprennent. "Le flux migratoire majeur provient de la DjĂ©zireh nord-est, victime du dĂ©sengagement de l'Etat et d'un exode rural massif, alors que dans les annĂ©es 70-80, la rĂ©gion Ă©tait un front pionnier trĂšs attractif", note le rapport. Selon l'Ă©conomiste Samir AĂŻta, 300 000 emplois ont Ă©tĂ© dĂ©truits dans l'agriculture entre 2003 et 2007 "et le mouvement ne peut que s'accĂ©lĂ©rer, ajoute M. Balanche. L'agriculture n'est plus la prioritĂ© du rĂ©gime, qui a besoin de l'eau agricole pour le dĂ©veloppement des mĂ©tropoles, de l'industrie et du secteur touristique". 2 sur 4 25/11/11 1152 L'Orient-Le Jour Comment les inĂ©galitĂ©s sociales et spatiales ... Le modĂšle damasquin La premiĂšre ville Ă  avoir bĂ©nĂ©ficiĂ© de ce retournement est la capitale syrienne, Damas. Selon le Bureau de l'investissement syrien, Damas concentre la moitiĂ© des investissements privĂ©s du pays, contre un cinquiĂšme pour Alep. Selon M. Balanche, c'est avec la politique d'ouverture Ă©conomique, inaugurĂ©e en 1991 avec la loi numĂ©ro 10 censĂ©e favoriser les investissements Ă©trangers, que la capitale syrienne a connu un tel succĂšs. "La bourgeoisie damascĂšne, bridĂ©e pendant trente ans par le rĂ©gime baasiste, a immĂ©diatement saisi les opportunitĂ©s du nouveau contexte Ă©conomique et de sa proximitĂ© gĂ©ographique avec les autoritĂ©s centrales", explique M. Balanche dans son document. Selon lui, le marchĂ© syrien a Ă©gament rĂ©ussi Ă  attirer quelques entreprises Ă©trangĂšres, en particulier dans l'agroalimentaire et la construction. "Cependant, ajoute-t-il, les conditions d'investissement, la rigueur du systĂšme d'embauche, hĂ©ritĂ©e de la pĂ©riode socialiste, la quasi-obligation de prendre un reprĂ©sentant syrien proche du pouvoir et la corruption ambiante dĂ©couragent les investisseurs." La loi numĂ©ro 10, toujours selon le spĂ©cialiste de la Syrie, a en fait Ă©tĂ© utilisĂ©e par des entrepreneurs syriens, dont certains vivaient Ă  l'Ă©tranger, depuis les nationalisations des annĂ©es 60 et 80, pour reprendre leur place dans l'Ă©conomie nationale. "Elle a facilitĂ© la privatisation des monopoles publics par la nouvelle bourgeoisie d'affaires issue du rĂ©gime, tel Rami Makhlouf", explique encore M. Balanche. "Diviser pour rĂ©gner", l'exemple aleppin Mais le succĂšs de Damas finit par inquiĂ©ter Bachar al-Assad, souligne l'expert. "Damas est devenue trop puissante, et Bachar, fidĂšle Ă  la politique paternelle de diviser pour rĂ©gner, s'efforce de rĂ©activer Alep pour concurrencer la capitale, explique-t-il. L'activitĂ© Ă©conomique de la ville s'est redressĂ©e dans les annĂ©es 1990 et, jusqu'Ă  la rĂ©volte syrienne, elle bĂ©nĂ©ficiait pleinement de l'accord de libre-Ă©change avec la Turquie en 2005." "Cependant, note encore M. Balanche, l'ouverture Ă©conomique n'a pas que des avantages, car les petites et moyennes entreprises aleppines souffrent de la concurrence des produits turcs et chinois. D'importantes faillites dans le textile ont eu lieu ces derniĂšres annĂ©es, l'agroalimentaire et la pharmacie rĂ©sistant mieux grĂące Ă  la protection d'une lĂ©gislation rigoureuse". Un autre dĂ©savantage de la politique d'ouverture Ă©conomique a Ă©tĂ© l'accroissement considĂ©rable des Ă©carts de richesse en Syrie, provoquant une frustration au sein de la population. "La politique d'amĂ©nagement du territoire baasiste n'est pas parvenue Ă  rééquilibrer durablement l'espace syrien, explique M. Balanche. Les villes portuaires de LattaquiĂ© et Tartus capitalisent mal les bĂ©nĂ©fices de leur fonction d'interface, en raison de la mainmise de l'asabiyya alaouite sur l'Ă©conomie locale. Le rĂ©seau secondaire de petites et moyennes villes se dĂ©grade avec le dĂ©sengagement de l'Etat et la crise de l'agriculture. Le secteur privĂ© ne parvient pas Ă  dĂ©velopper leur potentiel en raison du poids de la bureaucratie et de la fermeture des sociĂ©tĂ©s locales malgrĂ© les incitations fiscales de l'Etat, notamment dans le quart nord-est." "L'espace de l'Ă©conomie dirigiste et de la bureaucratie coexistent avec celui du libĂ©ralisme Ă©conomique et de la mondialisation, souligne enfin l'expert, car le rĂ©gime n'a pas effectuĂ© de rupture brutale avec le passĂ© pour prĂ©server les rĂ©seaux clientĂ©listes qui le soutiennent". 3 sur 4 25/11/11 1152 L'Orient-Le Jour Comment les inĂ©galitĂ©s sociales et spatiales ... "Si le problĂšme est social, la rĂ©ponse, en revanche, est communautaire", conclut M. Balanche. "Le retournement de l'espace syrien ne pouvait que dĂ©stabiliser un rĂ©gime qui tirait sa lĂ©gitimitĂ© d'une construction spatiale opposĂ©e Ă  celle qui s'impose aujourd'hui." Fabrice Balanche Directeur du Groupe de Recherches et d'Etudes sur la MĂ©diterranĂ©e et le Moyen-Orient Maison de l'Orient et de la MĂ©diterranĂ©e 4 sur 4 25/11/11 1152
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sociale: Objectif : comprendre les mutations sociales contemporaines dans les domaines de la stratification sociale, de la cohésion sociale et des conflits qui l'animent. Sous-partie 3 - Conflits et mobilisation sociale : Objectif : observer l'évolution des conflits qui accompagnent le changement social. Chapitre 10 - Changement social et
18h29, le 11 mai 2017, modifiĂ© Ă  18h47, le 11 mai 2017 Certes, "l’espĂ©rance de vie des Français est Ă©levĂ©e", et "la rĂ©duction de la mortalitĂ© se poursuit". Mais en dĂ©cortiquant le rapport 2017 sur "L’État de la santĂ© de la population en France", publiĂ© par la Direction de la recherche, des Ă©tudes, de l’évaluation et des statistiques Drees et l’agence SantĂ© publique France, les inĂ©galitĂ©s sont le niveau social des Français, les statistiques du rapport varient fortement. En clair l’état global de santĂ© des populations les plus dĂ©favorisĂ©es n’est pas le mĂȘme que celui des classes conditions de travail ou encore environnement quotidien le cadre de vie des Français les plus pauvres touche directement leur Ă©tat de de risque d’obĂ©sitĂ© pour les enfants d’ouvriers. Les donnĂ©es relevĂ©es en 2014 sur un panel d’enfants de CM2 montrent une corrĂ©lation entre situation socio-Ă©conomique et risques de surpoids. 12,7% des enfants de cadres Ă©taient en surpoids ou en obĂ©sitĂ©. C’est 20% pour les enfants d’employĂ©s, et le chiffre grimpe encore d’un point et demi pour les enfants d’ travail qui rend malade. Face aux maladies professionnelles, les ouvriers sont lĂ -aussi dĂ©favorisĂ©s. Plus exposĂ©s Ă  la pĂ©nibilitĂ© du travail et aux environnements polluants, ils tombent plus facilement malade Ă  cause de leur travail. Les statistiques sont sans appel 72% des maladies professionnelles dĂ©clarĂ©es touchent des ouvriers. 23% seulement concernent des employĂ©s du rĂ©gime gĂ©nĂ©ral. Pour les maladies liĂ©es Ă  l’amiante, dont le cancer du poumon, 92% des victimes travaillaient en tant qu’ Français les plus dĂ©favorisĂ©s sont aussi plus vulnĂ©rables face aux affections cardio-vasculaires la mortalitĂ© liĂ©e Ă  ces pathologies est 50% plus importante que pour les classes vie plus longue pour les plus aisĂ©s ? Ces inĂ©galitĂ©s face aux diffĂ©rents troubles et pathologies qui touchent l’état de santĂ© des Français induit un Ă©cart non nĂ©gligeable entre les espĂ©rances de vie des diffĂ©rents groupes socio-Ă©conomiques. A 35 ans, un cadre homme peut ainsi espĂ©rer vivre au moins six ans de plus qu’un ouvrier. C’est un peu plus de 3 ans pour une le rapport pointe des disparitĂ©s territoriales. La mortalitĂ© prĂ©maturĂ©e est beaucoup plus importante en Outre-mer, avec 30% de dĂ©cĂšs avant 65 ans, contre 18,5% en mĂ©tropole. Le nombre d’enfants mort-nĂ©s en Outre-mer reprĂ©sente plus du double des dĂ©cĂšs de nourrissons en France mĂ©thodologie ?Pour Ă©valuer la santĂ© des Français, la Drees se base sur plus de 200 indicateurs. Elle utilise plusieurs sources de donnĂ©es. Les statistiques d'Ă©tat civil d'abord, avec les certificats de naissance et de dĂ©cĂšs, ces derniers indiquant les causes mĂ©dicales de la mort. Les enquĂȘteurs consultent Ă©galement les registres de pathologies mĂ©dicales, pour les cancers par exemple. Ils ont enfin recours Ă  des enquĂȘtes de santĂ© au tĂ©lĂ©phone, oĂč ils peuvent Ă©galement se renseigner sur la situation socio-Ă©conomique des personnes interrogĂ©es. Celle-ci est Ă©valuĂ©e Ă  l'Ă©chelle communale en fonction du revenu fiscal mĂ©dian, du nombre de diplĂŽmĂ©s de niveau baccalaurĂ©at et plus, et de la part d'ouvriers et de chĂŽmeurs dans la tranche d'Ăąge 15-64 ans. Ils s'informent aussi sur le mode de recours aux soins des Français, frĂ©quence des hospitalisations, modes de remboursements. Des examens mĂ©dicaux, cliniques et biologiques, sont par ailleurs rĂ©alisĂ©es sur un panel d'individus.
Desliens sociaux Ă  la cohĂ©sion sociale Niveaux de santĂ©, de bien-ĂȘtre et de cohĂ©sion sociale des populations Contrastes et inĂ©galitĂ©s entre territoires, entres groupes sociaux et Ă  l’international État de santĂ© : une articulation de dĂ©terminants DiversitĂ©s des dĂ©terminants Interactions des dĂ©terminants : modĂšles explicatifs ProblĂ©matiques sociales et reconnaissance des
Notez, un dĂ©putĂ© national toucherait actuellement, selon des sources crĂ©dibles, au moins 4 030$ ; et environ 6 000$ pour les sĂ©nateurs le mois. Les dĂ©putĂ©s provinciaux, eux, recevraient chacun 2 500$. Les ministres nationaux envoisineraient les 15 000$ de salaire mis Ă  part tous les autres avantages, mais au niveau provincial, un ministre aurait 5 000$ de salaire brut. Le gouverneur de province touchait jusque 2011, plus de 10 000 dollars mensuel, officiellement. Qu’en est-il des autres couches de la sociĂ©tĂ© ? Militaires et policiers de grade moyen franchissent peu souvent la barre de 100$. Il en est de mĂȘme des enseignants, des infirmiers et de plusieurs autres agents du mĂȘme secteur de l’administration publique. Ici, on se rend clairement compte que le salaire d’un agent de sĂ©curitĂ© militaire et policier entre 110 fois dans celui d’un dĂ©putĂ© national qu’il est tenu de sĂ©curiser. Celui d’un sĂ©nateur cooptĂ© est 130 fois plus supĂ©rieur que celui d’un infirmier qui le soigne ou d’un enseignant qui l’a instruis. Ces inĂ©galitĂ©s se font aussi ressentir dans le secteur commercial oĂč l’on observe que de nombreux hommes d’affaires rĂ©alisent des gros bĂ©nĂ©fices pour ne payer que des miettes aux travailleurs qui les ont pourtant permis d’atteindre leurs bon rĂ©sultats. Bref, on sait voir que des inĂ©galitĂ©s sociales sont profondes mais surtout artificielles. Elles sont fabriquĂ©s. Or, les inĂ©galitĂ©s sociales, la pauvretĂ© ou la prĂ©caritĂ©, l’exclusion sont des entraves Ă  la cohĂ©sion sociale. Non seulement, elles parmi les causes de la plupart d’homicides commis en RDC. Contrairement a ce que pense plus d’un homme, les classes les plus dĂ©munies ne sont pas en elles-mĂȘmes dangereuses, mais le fait de mener des politiques d’exclusion et d’inĂ©galitĂ©, peuvent les rendre assez dangereuses. De mĂȘme, les Ă©conomistes d’opinion keynĂ©sienne estiment que les inĂ©galitĂ©s sociales sont un frein Ă  la croissance Ă©conomique car aprĂšs qu’elles diminuent la consommation des mĂ©nages, elles provoquent aussi la hausse du taux de chĂŽmage. Nous pouvons donc fournir un effort pour rĂ©duire ces inĂ©galitĂ©s dans notre sociĂ©tĂ© si nous visons rĂ©ellement amplifier la cohĂ©sion sociale. l’Ɠil de l’économiste Post Views 14 778
Enl’espĂšce, il s’agit, Ă  partir d’un questionnement sur la construction des inĂ©galitĂ©s de santĂ© liĂ©es Ă  l’exposition Ă  des polluants, de comprendre comment la connaissance des dĂ©terminants de santĂ© participe Ă  la mise en place de solutions pour rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s environnementales de santĂ©. Ainsi, les Ă©lĂšves seront
1 Une premiĂšre version de ce texte a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e pendant l’UniversitĂ© d’étĂ© Penser les inĂ©galitĂ©s... 1Pour penser les inĂ©galitĂ©s » 1, il faut tenir compte de leur dimension spatiale. Selon Henri Lefebvre 1968, la ville est la projection au sol des rapports sociaux » ; les inĂ©galitĂ©s sociales ont nĂ©cessairement une traduction spatiale. Mais la notion mathĂ©matique de projection a un caractĂšre mĂ©canique et simplificateur la reprĂ©sentation sur un plan d’un objet dans l’espace simplifie ou rĂ©duit l’objet et elle dĂ©pend des positions respectives de l’objet projetĂ© et du plan. Dans la mĂ©taphore de la projection au sol des rapports sociaux, le spatial prime sur le social, mais leur relation est dialectique, avec des effets en retour Blanc, 2007. 2La mixitĂ© sociale est une politique consensuelle qui vise Ă  rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s sociales en intervenant sur l’espace. Ce texte a deux objectifs en s’inspirant de Georg Simmel, montrer comment la mixitĂ© sociale est prise dans des contradictions et produit des effets pervers. Ensuite, esquisser comment le paradigme de la transaction sociale permet une conceptualisation plus satisfaisante de la mixitĂ© sociale et ouvre des pistes pour le dĂ©passement de ses contradictions internes. La mixitĂ© sociale au cƓur du conflit entre la libertĂ© et l’égalitĂ© 3En France, une reprĂ©sentation sociale communĂ©ment admise voudrait que la cohĂ©sion de la sociĂ©tĂ© soit un objectif majeur une sociĂ©tĂ© sans cohĂ©sion et sans solidaritĂ© est une sociĂ©tĂ© qui se dĂ©lite et qui risque de disparaĂźtre. Pour cela, il faudrait que l’État lutte contre les tendances Ă  la sĂ©paration, en premier lieu contre la sĂ©grĂ©gation. L’enjeu de cette lutte serait une sociĂ©tĂ© mixte », dans laquelle les individus seraient Ă©gaux et libres de se dĂ©placer en tout lieu. Cette reprĂ©sentation est contradictoire avec une seconde, communĂ©ment admise elle aussi, qui dĂ©nonce les mĂ©faits de l’État-Providence la sĂ©curitĂ© sociale et l’ensemble de la protection sociale auraient des effets pervers ; les individus deviendraient des assistĂ©s sociaux » et ils attendraient tout de l’État, au lieu de chercher Ă  se sortir d’affaire par eux-mĂȘmes. On voit bien aujourd’hui comment, malgrĂ© les efforts du prĂ©sident Barack Obama, les USA sont engluĂ©s dans une dĂ©fense obsessionnelle de la libertĂ© contre le trop d’État » et contre l’égalitarisme », dĂ©noncĂ© comme la non reconnaissance des mĂ©rites individuels. Ces deux reprĂ©sentations s’opposent, mĂȘme si elles peuvent ĂȘtre prĂ©sentes dans le mĂȘme discours. La premiĂšre donne la prioritĂ© Ă  une valeur fondamentale, l’égalitĂ© ; la seconde met en avant une valeur tout aussi fondamentale, la libertĂ©. La libertĂ© inclut notamment la possibilitĂ© de vivre entourĂ© de ses proches. Le dĂ©bat sur la mixitĂ© prend sens dans le cadre de ce conflit de valeurs. Alexis de Tocqueville [1993 [1835], puis Georg Simmel, ont montrĂ© que le conflit entre l’égalitĂ© et la libertĂ© est un conflit irrĂ©ductible L’antinomie profonde entre la libertĂ© et l’égalitĂ© [
] ne peut se rĂ©soudre que [
] dans la nĂ©gativitĂ© de l’absence de possession et de l’absence de puissance [
]. Ce fut peut-ĂȘtre parce qu’instinctivement on a saisi la difficultĂ© de cet Ă©tat de choses qu’on a joint Ă  la libertĂ© et Ă  l’égalitĂ© une troisiĂšme exigence, celle de la fraternitĂ© » Simmel, [1907] 1981, pp. 144-145. 4Il faut d’abord lever les ambiguĂŻtĂ©s et clarifier les notions de sĂ©grĂ©gation et de mixitĂ©, en distinguant leur dimension spatiale et leur dimension sociale, ainsi que leur caractĂšre imposĂ© ou voulu. Il sera alors possible d’analyser les formes prises par la mixitĂ© et la sĂ©grĂ©gation dans les registres fondamentaux de l’anthropologie et de la sociologie le sexe, l’ñge, l’ethnicitĂ© et la classe sociale. Ces relations sont faites Ă  la fois d’opposition irrĂ©ductible et de complĂ©mentaritĂ©, ce qui explique de multiples traductions spatiales. Le couple de la mixitĂ© et de la sĂ©grĂ©gation 5MixitĂ© et sĂ©grĂ©gation sont deux pĂŽles opposĂ©s, mais de quoi ? Analytiquement, il faut dissocier la dimension sociale et la dimension spatiale des processus de sĂ©grĂ©gation et de mixitĂ© ces deux dimensions se recouvrent, mais en partie seulement. Contrairement au prĂ©supposĂ© implicite de la mixitĂ© sociale, le rapprochement physique ou spatial n’implique pas automatiquement un dĂ©veloppement des Ă©changes sociaux. Dans La SociĂ©tĂ© de Cour, Norbert Elias 2008 [1939] notait que les domestiques au service du Roi sont trĂšs proches de lui physiquement, mais trĂšs Ă©loignĂ©s socialement. S’il y a un certain cĂŽtoiement des classes sociales Ă  la Cour, ce n’est ni de la cohabitation, ni de la mixitĂ© sociale. La dimension spatiale ne se limite pas Ă  la dimension rĂ©sidentielle, mais cette derniĂšre occupe une place importante. Les conflits entre bons » et mauvais » voisins sont frĂ©quents et ils invitent Ă  marquer la distance plutĂŽt qu’à rechercher le rapprochement. C’est pourquoi la fameuse opposition proximitĂ© spatiale et distance sociale » a connu un grand succĂšs. Elle ne se limite pas aux grands ensembles dans lesquels elle a Ă©tĂ© observĂ©e en premier ChamborĂ©don & Lemaire, 1970. 6La cohabitation forcĂ©e de groupes qui ne la souhaitent pas conduit habituellement Ă  l’évitement et Ă  l’exacerbation des conflits de voisinage. Ceci introduit une seconde distinction analytique, selon le caractĂšre imposĂ© ou choisi de la sĂ©grĂ©gation et de la mixitĂ©. La sĂ©grĂ©gation a une connotation trĂšs nĂ©gative car elle est spontanĂ©ment perçue comme imposĂ©e Ă  ceux qui la subissent. Elle peut ĂȘtre inscrite dans la loi qui rĂ©serve un espace, le ghetto, Ă  l’usage exclusif d’un groupe ethnique et/ou religieux. Elle est plus souvent le rĂ©sultat d’un ensemble de rĂšgles non Ă©crites, Ă  commencer par la loi d’airain du marchĂ© qui rĂ©partit riches et pauvres dans l’espace en fonction du prix du foncier. Il y a aussi une sĂ©grĂ©gation voulue, mais rarement perçue comme telle. Qui se ressemble s’assemble », dit le proverbe. On se rapproche de ceux que l’on connaĂźt et avec qui on a des affinitĂ©s le mĂȘme mĂ©tier, les mĂȘmes loisirs, une origine commune, etc. Pour se regrouper entre soi, on s’éloigne nĂ©cessairement des autres, mĂȘme s’il n’y a aucune hostilitĂ© envers eux. Le rĂ©sultat est une sĂ©grĂ©gation que Nicole Haumont 1996 appelle, en faisant un jeu de mots subtil, une agrĂ©gation ». 7Pour la France, le constat d’Éric Maurin 2004 est accablant du haut en bas de la pyramide sociale, la sociĂ©tĂ© s’organise selon ce qu’il appelle le sĂ©paratisme social », ou le ghetto les beaux quartiers » pour les riches Pinçon-Charlot, 2001, les quartiers stigmatisĂ©s pour les pauvres et les Ă©trangers. SĂ©grĂ©gation subie et agrĂ©gation voulue sont les pĂŽles extrĂȘmes, mais elles se combinent dans de nombreux cas. Le ghetto a un caractĂšre paradoxal ses habitants peuvent ressentir douloureusement qu’ils sont rejetĂ©s et assignĂ©s Ă  rĂ©sidence ; en mĂȘme temps, ils peuvent trouver qu’ici au moins ils n’ont pas Ă  supporter le regard dĂ©sapprobateur et mĂ©prisant des classes supĂ©rieures Lapeyronie, 2008. La mixitĂ© sociale imposĂ©e produit des cohabitations conflictuelles Enforced desegregation is no better than enforced segregation » Edgar et al., 2004. Les formes et les limites de la mixitĂ© sociale 8Il sera peu question ici de la mixitĂ© des fonctions urbaines. Dans La Charte d’AthĂšnes, Le Corbusier 1971 [1942] prĂ©conisait la sĂ©paration des fonctions habiter, travailler, se recrĂ©er et circuler. La coupure entre l’espace de l’habitat et celui du travail se fonde sur un argumentaire hygiĂ©niste les ouvriers ont droit Ă  l’air pur et au soleil, loin des pollutions industrielles. En mĂȘme temps, Le Corbusier voyait dans l’urbaniste l’accoucheur » de la sociĂ©tĂ© moderne. Les grands ensembles voulaient ĂȘtre des citĂ©s radieuses » et des foyers de convivialitĂ©. Le Corbusier Ă©tait partisan Ă  la fois de la spĂ©cialisation des espaces donc d’une forme de sĂ©grĂ©gation spatiale et de la mixitĂ© sociale. Il Ă©tait convaincu qu’un bon urbanisme permettrait de faire l’économie d’une rĂ©volution Le Corbusier, 2008 [1923]. Une forme urbaine judicieusement choisie aurait des effets positifs sur les relations de voisinage, permettant le dĂ©veloppement d’une communautĂ© harmonieuse. L’espace influence les relations sociales, positivement ou nĂ©gativement. Mais la forme urbaine n’a pas d’influence mĂ©canique sur les pratiques des habitants et il est risquĂ© de faire d’elle un levier de l’ingĂ©nierie sociale. Le mĂ©lange des sexes 2 Pascale Kremer et Martine Laronche, La condition des jeunes filles s’est dĂ©gradĂ©e dans les quarti ... 9C’est une dimension essentielle, qui illustre la double face de la mixitĂ© sociale. C’est d’abord Ă  l’école qu’il faut poser la question de la mixitĂ© des sexes. Ma gĂ©nĂ©ration a encore connu des Ă©coles et des lycĂ©es de garçons, distincts de ceux des filles. Aujourd’hui, cette mixitĂ© dĂšs le plus jeune Ăąge est un grand progrĂšs pour tout le monde. C’est en cĂŽtoyant rĂ©ellement l’autre sexe et non de façon imaginaire et fantasmĂ©e, que l’on s’apprivoise mutuellement, que l’on arrive Ă  se connaĂźtre, Ă  gĂ©rer ses diffĂ©rences et ses oppositions. Pourtant, au dĂ©but des annĂ©es 2000, des jeunes filles maghrĂ©bines se sont plaintes du machisme » de leurs frĂšres, petits et grands, dans l’enceinte scolaire ; elles aspiraient Ă  des lieux bien Ă  elles. LĂ  au moins, elles seraient Ă  l’abri des violences et du harcĂšlement 2. À un autre niveau, de nombreux mouvements fĂ©ministes rĂ©clament des lieux pour que les femmes puissent se rĂ©unir entre elles, de façon non mixte. Si des hommes sont prĂ©sents, ils tendent Ă  monopoliser la parole, mĂȘme s’ils se dĂ©clarent fĂ©ministes »  On ne peut affirmer que la mixitĂ© des sexes soit automatiquement un progrĂšs ; tout dĂ©pend du contexte et il faut se demander si la mixitĂ© favorise l’émancipation des femmes ou si elle contribue Ă  les maintenir, sous de nouvelles formes, dans la soumission. Le plus souvent, le refus de la mixitĂ© des sexes est le fait des conservateurs la nostalgie des Ă©coles sĂ©parĂ©es est bien enracinĂ©e chez les intĂ©gristes religieux, chrĂ©tiens ou musulmans. 3 Jacques Isnard, Les femmes sont l’avenir de l’armĂ©e française », Le Monde, 10La mixitĂ© scolaire se prolonge par la mixitĂ© professionnelle, fortement encouragĂ©e par l’Union europĂ©enne qui a fait de l’égalitĂ© entre les hommes et les femmes une de ses prioritĂ©s. La fĂ©minisation des professions traditionnellement rĂ©servĂ©es aux hommes a des effets positifs. Les connaisseurs de l’armĂ©e et de la police reconnaissent que la prĂ©sence fĂ©minine fait obstacle Ă  une culture machiste » qui permet encore bien des abus 3. En mĂȘme temps, la guerre d’Irak a montrĂ© que, dans l’armĂ©e amĂ©ricaine, les femmes soldats pouvaient ĂȘtre aussi redoutables que les hommes en matiĂšre de torture. Éduquer ensemble filles et garçons, ouvrir toutes les professions aux femmes comme aux hommes, voilĂ  des choix de sociĂ©tĂ© qui, sans nier la biologie, sont indĂ©pendants d’elle. La mixitĂ© des sexes est bien une forme de mixitĂ© sociale. Le mĂ©lange des gĂ©nĂ©rations 11La mixitĂ© des gĂ©nĂ©rations est une autre forme. Elle a des rĂ©percussions importantes sur l’amĂ©nagement des villes. Je me limite Ă  deux exemples, les jeunes et les personnes ĂągĂ©es. Un certain nombre d’entre eux connaissent des formes de logement spĂ©cifique le foyer » du troisiĂšme Ăąge ou du jeune travailleur, la citĂ© » universitaire, etc. Cette sĂ©paration traditionnelle se fonde sur de bonnes raisons. Jeunes et vieux ont des modes de vie et des besoins diffĂ©rents, mĂȘme si cette opposition est schĂ©matique et connaĂźt de nombreuses exceptions. Les seconds aspirent au calme et ils ont besoin de soins adaptĂ©s. Les premiers ont besoin d’espaces pour faire du sport, de la musique, etc. En vivant ensemble, ils se gĂȘneraient mutuellement. La sĂ©paration permet Ă  chaque groupe de vivre comme il l’entend. 12Mais il ne faut pas nĂ©gliger le revers de la mĂ©daille. Les personnes ĂągĂ©es extraites de leur milieu de vie et regroupĂ©es entre elles sont dĂ©sorientĂ©es. Elles se sentent isolĂ©es et inutiles et, du coup, elles dĂ©pĂ©rissent rapidement. Le maintien Ă  domicile, dans leur environnement familier et avec les adaptations nĂ©cessaires, est bien prĂ©fĂ©rable. Mais il arrive un moment oĂč les soins mĂ©dicaux et autres deviennent trop lourds pour pouvoir s’effectuer Ă  domicile. La maison de retraite mĂ©dicalisĂ©e s’impose alors et la mixitĂ© des gĂ©nĂ©rations atteint une de ses limites. 13Pour les jeunes aussi, vivre entre soi prĂ©sente Ă  la fois des avantages et des inconvĂ©nients. Le logement des jeunes est trĂšs segmentĂ©. Les Ă©tudiants sont dans des citĂ©s, les jeunes travailleurs dans des foyers. Jusqu’à une date rĂ©cente, citĂ©s et foyers logeaient sĂ©parĂ©ment hommes et femmes. Aujourd’hui, seule une sĂ©grĂ©gation manifestement sociale est maintenue entre Ă©tudiants, destinĂ©s Ă  devenir de futurs cadres mĂȘme si leur avenir professionnel est incertain et jeunes ouvriers souvent au chĂŽmage. Sauf exception, ces jeunes, qui ne sont pas logĂ©s Ă  la mĂȘme enseigne, ne viennent pas des mĂȘmes milieux sociaux. Ils n’ont ni les mĂȘmes modes de vie, ni les mĂȘmes perspectives d’avenir. Est-ce une raison pour vivre chacun de son cĂŽtĂ© et dans l’ignorance de l’autre ? C’est poser la question de la mixitĂ© proprement sociale et, en simplifiant, de la cohabitation entre riches et pauvres. Le mĂ©lange des classes sociales 14Il y a une multitude de critĂšres de ressemblance le mĂ©tier, la langue, la religion, la nationalitĂ©, la passion pour le sport, la musique ou l’alcool, etc. Le plus souvent, ces critĂšres se combinent subtilement Ă  l’intĂ©rieur des classes sociales. Pour donner un exemple caricatural, les enfants de la bourgeoisie sont nombreux Ă  jouer au piano et au tennis et Ă  boire du whisky. Par contre, les enfants des milieux populaires jouent au football et boivent de la biĂšre, peut-ĂȘtre par goĂ»t, mais aussi parce que c’est moins cher. MĂȘme lorsque les participants le nient, la classe sociale, dont le niveau de ressources est un marqueur essentiel, joue un rĂŽle important dans ces regroupements affinitaires Bourdieu, 1979. C’est notamment le cas dans le domaine du logement. Les habitants d’un mĂȘme immeuble peuvent avoir entre eux de trĂšs grands Ă©carts, en termes de modes de vie et de richesse, mais ils ont un point commun ils ont la capacitĂ© de payer le prix demandĂ©. Sinon, ils seraient rapidement expulsĂ©s. Cette rĂšgle trĂšs simple joue dans le secteur libre, rĂ©gi par les mĂ©canismes du marchĂ©. Mais elle s’applique aussi dans le logement social, son mode de financement aboutissant Ă  une correspondance assez Ă©troite entre les immeubles et les niveaux de ressources voir ci-aprĂšs. L’intĂ©gration des Ă©trangers 15À certaines pĂ©riodes de l’histoire, les Juifs ont Ă©tĂ© assignĂ©s Ă  rĂ©sidence dans des ghettos. Au sens propre, il n’y a plus guĂšre de ghettos aujourd’hui, c’est-Ă -dire d’espaces Ă  l’usage exclusif d’un groupe. On peut parler Ă  la rigueur de ghettos de riches » Pinçon & Pinçon-Charlot, 2000 ; Maurin, 2004. Il continue Ă  y avoir des ghettos », dans le sens peu rigoureux de concentrations d’étrangers, dans certains quartiers dĂ©valorisĂ©s et stigmatisĂ©s, Ă  Strasbourg, Paris, Londres, Chicago ou Johannesburg. En France, c’est le plus souvent dans les grands ensembles de logements sociaux en lointaine banlieue. En Grande-Bretagne et en AmĂ©rique du Nord, c’est surtout dans l’habitat dĂ©gradĂ© du centre ville, avant le processus de gentrification. Dans les deux cas, c’est une forme de rejet des Ă©trangers. Ils logent dans ce qui reste, quand les autres ont pris le meilleur Blanc, 2003. 16La mixitĂ© sociale est prĂ©sentĂ©e comme une valeur rĂ©publicaine » ce qui n’est jamais dĂ©fini et comme la condition d’une bonne intĂ©gration des Ă©trangers, devenant implicitement une mixitĂ© ethnico-sociale. L’argumentaire voudrait que les Ă©trangers, restant entre eux, ne puissent s’intĂ©grer dans le pays d’accueil. Cette volontĂ© de brassage des populations Ă©trangĂšres part d’une bonne intention, mais aussi d’une grande ignorance un certain nombre d’étrangers souhaitent vivre avec des compatriotes et non au milieu d’une population dont ils ignorent la langue et la culture. Les disperser revient Ă  les isoler et Ă  renforcer leur marginalisation. La communautĂ© ethnique n’est pas toujours un obstacle Ă  l’intĂ©gration, elle peut au contraire jouer un rĂŽle d’intermĂ©diaire et de sas Blanc, 2004a. 4 CitĂ© par Mathilde Mathieu, Un camping de Pornichet soupçonnĂ© de discrimination raciale », Le Mond ... 17Le discours mĂ©diatique sur l’étranger l’assimile implicitement Ă  un pauvre. Sans coĂŻncider totalement, le rejet de l’étranger et celui du pauvre vont ensemble. Le paradoxe est que le rejet du pauvre est admis, celui de l’étranger de moins en moins. Le propriĂ©taire d’un camping soupçonnĂ© de discrimination raciale a eu, pour sa dĂ©fense, cette phrase Ă©loquente Je ne regarde que le porte-monnaie des clients et jamais la couleur de la peau » 4. Il serait coupable s’il avait refusĂ© un client Ă  cause de sa nationalitĂ© et/ou de ses origines. Il est innocent puisqu’il s’est lĂ©gitimement inquiĂ©tĂ© de la solvabilitĂ© de son client. Personne ne s’offusque de cette discrimination par l’argent qui se pratique Ă  grande Ă©chelle riches et pauvres ne vont pas dans les mĂȘmes hĂŽtels, restaurants ou cafĂ©s. Le dogme français de la mixitĂ© sociale 18Dans un grand nombre de pays, la rĂ©duction de la sĂ©grĂ©gation est une prĂ©occupation majeure de la planification urbaine. Mais les objectifs visĂ©s sont rarement atteints et les rĂ©sultats obtenus s’avĂšrent dĂ©cevants Bolt et al., 2010. Fruit d’une longue tradition centralisatrice et jacobine, la planification urbaine en France est orchestrĂ©e par le gouvernement central et il privilĂ©gie le recours Ă  la loi dans la lutte contre la sĂ©grĂ©gation. La loi relative Ă  la SolidaritĂ© et au renouvellement urbain SRU de dĂ©cembre 2000 fait de la mixitĂ© sociale une valeur cardinale. Elle a voulu renforcer et rendre plus contraignants les dispositifs de la loi d’orientation de la ville de 1991, dite anti-ghetto ». Elle a Ă©tĂ© Ă  son tour complĂ©tĂ©e par la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rĂ©novation urbaine en aoĂ»t 2003 voir section ci-aprĂšs. L’analyse de ces nouveaux dispositifs est source d’étonnement, faisant douter du rĂ©alisme de ces mesures section suivante. Les bilans rĂ©alisĂ©s au bout de dix ans montrent des rĂ©sultats maigres et paradoxaux la mixitĂ© sociale reste un idĂ©al bien lointain section d’aprĂšs. L’empilement des lois 19Il y a toujours une part d’arbitraire dans la dĂ©termination du dĂ©but d’une politique publique car la loi, ou le rĂšglement, formalisent des rĂ©flexions engagĂ©es prĂ©alablement. Pour la mixitĂ© sociale en France, la loi d’Orientation pour la ville de 1991 marque une Ă©tape importante. À l’époque, elle a d’ailleurs Ă©tĂ© surnommĂ©e la loi anti-ghetto ». Elle affirme la nĂ©cessitĂ© d’empĂȘcher la sĂ©grĂ©gation ; les grands ensembles de logements sociaux dans les banlieues sont explicitement sa cible principale. Cette loi ne concerne que les agglomĂ©rations urbaines de plus de 200 000 habitants, elle veut gĂ©nĂ©raliser l’usage des Programmes locaux de l’habitat dans la planification locale, etc. Comme beaucoup de lois d’orientation, celle-ci Ă©nonce des principes, tout en restant vague sur les mesures concrĂštes Ă  mettre en Ɠuvre. 5 Les chiffres varient selon les sources Ă  partir des dĂ©clarations des rĂ©sidents, les recensements ... 20En dĂ©cembre 2000, la loi SolidaritĂ© et renouvellement urbain SRU rĂ©affirme l’importance de la mixitĂ© sociale et elle met en place un dispositif plus contraignant. En sachant qu’à l’époque le logement social reprĂ©sentait 16 Ă  17 % du parc de logement de la France mĂ©tropolitaine 5, cette loi concerne les agglomĂ©rations urbaines de plus de 50 000 habitants, Ă  l’intĂ©rieur desquelles elle impose aux communes de plus de 1 500 habitants en Île-de-France plus de 3 500 ailleurs, d’atteindre en vingt ans donc d’ici 2020 un seuil minimum de 20 % de logements sociaux sur leur territoire ; 730 communes Ă©taient concernĂ©es Ă  l’époque. Elles ont Ă©tĂ© soumises Ă  des engagements, Ă©valuĂ©s tous les trois ans, pour rĂ©sorber progressivement leur dĂ©ficit. Le PrĂ©fet est chargĂ© de surveiller la bonne exĂ©cution de la loi SRU dans son DĂ©partement ; il a la possibilitĂ© trĂšs peu utilisĂ©e d’infliger des amendes aux communes rĂ©calcitrantes. Économiquement et techniquement, cet objectif peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme rĂ©aliste, mais ambitieux et nĂ©cessitant une volontĂ© politique forte. 21En aoĂ»t 2003, la loi d’orientation et de programmation de la Ville et de la RĂ©novation urbaine est adoptĂ©e. Il faut noter qu’elle rĂ©introduit l’expression de rĂ©novation urbaine », qui Ă©tait utilisĂ©e dans les annĂ©es 1960 et qui a laissĂ© de trĂšs mauvais souvenirs la rĂ©novation Ă©tait la destruction des immeubles dĂ©clarĂ©s insalubres dans les vieux quartiers centraux et la construction de nouveaux logements, pas forcĂ©ment sur place et bien souvent Ă  la pĂ©riphĂ©rie Coing, 1966. La loi SRU a soigneusement Ă©vitĂ© cette expression, lui prĂ©fĂ©rant celle, plus neutre, de renouvellement » urbain. 22La loi de 2003 a renouĂ© avec la politique de la table rase », lançant un programme massif de rĂ©novation-destruction, appelĂ© Programme national de rĂ©novation urbaine PNRU. 250 000 logements sociaux, principalement dans les banlieues, devaient ĂȘtre dĂ©truits en cinq ans. En principe, 250 000 logements de remplacement devaient ĂȘtre construits, mais en grande partie ailleurs, pour aboutir Ă  une plus grande mixitĂ© sociale il fallait d’une part attirer les classes moyennes dans les quartiers stigmatisĂ©s pour changer leur image ; il fallait aussi disperser les locataires pauvres du logement social pour casser les ghettos », en reprenant le mot d’ordre du gouvernement d’union de la Gauche de Lionel Jospin Domergue, 2010, p. 33. Pour exĂ©cuter ce programme au double sens du terme, la loi a créé l’Agence nationale pour la rĂ©novation urbaine ANRU, ce qui permet au gouvernement central de piloter les opĂ©rations et de contrĂŽler les autoritĂ©s locales, par le biais des financements. 232010 a Ă©tĂ© l’occasion d’un bilan Ă  mi-parcours pour la loi SRU, qui se donne jusqu’à 2020 pour atteindre 20 % de logements sociaux partout. Puisque les deux sont intimement liĂ©s, c’est aussi l’occasion de faire le bilan du PNRU il aurait dĂ» s’achever en 2008, mais il a Ă©tĂ© prolongĂ© jusqu’en 2013, sous le sigle PNRU 2. Ce bilan est en demi-teinte. L’hostilitĂ© Ă  la loi SRU a fortement baissĂ© voir section suivante. Sur les 730 communes concernĂ©es, 325, soit 45 %, ne sont pas en rĂšgle avec la loi SRU. Pour se justifier, de nombreux maires mettent en avant les problĂšmes techniques et financiers, notamment le prix des terrains particuliĂšrement en rĂ©gion parisienne et sur la CĂŽte d’Azur ; ils affirment leur bonne foi et ils plaident pour un allongement des dĂ©lais. 6 Laurence Boccara, Le bilan contrastĂ© de la loi SRU », Les Échos, 7 Patrick Doutreligne, dĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral de la Fondation AbbĂ© Pierre, citĂ© par Isabelle Rey-Lefebvre, ... 24Mais l’envolĂ©e du prix du foncier peut aussi servir d’alibi. Une poignĂ©e d’élus locaux prĂ©fĂšre payer des pĂ©nalitĂ©s que de construire du logement social. Les pĂ©nalitĂ©s sont trop faibles pour ĂȘtre dissuasives Cette taxe, dont le calcul complexe fait passer le montant [de 152] Ă  324 euros, est prĂ©levĂ©e par l’État sur les ressources fiscales de la commune, mais le dispositif coercitif n’a finalement jamais dĂ©montrĂ© son efficacitĂ© » 6. Ce que confirme le sĂ©nateur de l’Union pour la majoritĂ© prĂ©sidentielle UMP, Jean-Paul Alduy citĂ© dans le mĂȘme article Il existe mille et une façons de ne pas payer ou de minorer cette amende. Bref, il est facile de passer Ă  travers les mailles du filet ». Parmi les villes rĂ©fractaires, on trouve Neuilly-sur-Seine, la ville du prĂ©sident Nicolas Sarkozy ! Tout en se rĂ©jouissant qu’une dynamique vertueuse soit enclenchĂ©e, la Fondation AbbĂ© Pierre regrette que 325 communes ne respectent pas la loi et 240 seulement ont Ă©tĂ© sanctionnĂ©es. L’État devrait ĂȘtre plus ferme, il faudrait tripler les pĂ©nalitĂ©s et que l’État fasse jouer son droit de substitution aux maires dĂ©faillants » 7. 25En ce qui concerne le PNRU, ce programme irrĂ©aliste n’a pas atteint ses objectifs fin 2010 donc deux ans aprĂšs la date initialement annoncĂ©e pour la fin du programme, le nombre de logement dĂ©molis n’était que » de 139 000, pour 133 000 logements reconstruits CES ANRU, 2011, p. 8. Dans une pĂ©riode de dĂ©ficit de logements abordables, cette destruction systĂ©matique est choquante on aurait pu mobiliser ces moyens pour construire davantage, au lieu de construire “à la place” » Domergue, 2010, p. 35. Le ComitĂ© d’évaluation et de suivi de l’ANRU note plusieurs limites importantes les conditions de vie des habitants ne sont pas suffisamment amĂ©liorĂ©es ; [
] la mixitĂ© sociale espĂ©rĂ©e n’est pas globalement atteinte » CES ANRU, 2011, p. 16. La mixitĂ© sociale, un consensus sur une chimĂšre impossible Ă  mesurer 26En 2000, dans un gouvernement d’union de la Gauche, un Ministre communiste de l’Équipement et du logement, Jean-Claude Gayssot, a Ă©tĂ© le maĂźtre d’Ɠuvre de la loi SRU. Ce portage politique ne surprend pas, la Gauche et la Droite s’étant vigoureusement opposĂ©es lors du dĂ©bat parlementaire. Pourtant, en d’autres temps, les marxistes se mĂ©fiaient de la mixitĂ© sociale, dans laquelle ils voyaient une ruse du patronat pour tenter de diluer la conscience de classe ouvriĂšre Guerrand, 1966. Mais la mixitĂ© sociale est cohĂ©rente avec le communisme municipal », tel qu’il a Ă©tĂ© pratiquĂ© notamment dans l’ex- banlieue rouge » parisienne. L’égalitĂ© entre les communes est le souci principal dans les annĂ©es 1960, les municipalitĂ©s communistes ont tentĂ© de s’opposer, sans grand succĂšs, Ă  la volontĂ© du gouvernement central et de la ville de Paris de construire chez elles les grands ensembles pour le relogement des exclus de la rĂ©novation Baudin, 2000 ; Castells et al., 1973. Elles soutenaient que ce fardeau » ne devait pas reposer uniquement sur les communes ouvriĂšres, qui avaient dĂ©jĂ  suffisamment de pauvres, mais qu’il devait ĂȘtre Ă©galement rĂ©parti entre toutes les communes. 8 Jean Leonetti, citĂ© par Isabelle Rey-Lefebvre, La France doit-elle construire plus de logements s ... 27En 2003, le Ministre de l’Équipement et du logement est un centriste, Jean-Louis Borloo, membre de l’Union pour la majoritĂ© prĂ©sidentielle de Jacques Chirac. Il a Ă©tĂ© le promoteur de la politique de rĂ©novation urbaine massive et il a rĂ©sistĂ© aux appels de la fraction de la droite la plus conservatrice elle voulait abolir ou au moins assouplir l’obligation de mixitĂ© sociale, au nom de la libertĂ© et du marchĂ©. En matiĂšre de politique du logement, la mixitĂ© fait aujourd’hui partie du socle commun acceptĂ© par la Droite et la Gauche. Le maire d’Antibes CĂŽte d’Azur et dĂ©putĂ© de l’Union pour la majoritĂ© prĂ©sidentielle UMP a votĂ© contre la loi SRU en 2000. Il dĂ©clare aujourd’hui malgrĂ© ses imperfections, la loi SRU a Ă©tĂ© un outil, un levier pour imposer la mixitĂ© sociale dans nos communes » 8. Dans ce domaine, la continuitĂ© l’emporte sur la rupture Blanc, 2007. La loi de 2003 renforce les moyens de rĂ©aliser la mixitĂ© sociale prĂ©vue en 2000, en Ă©tant aveugle Ă  ses effets pervers. 28Cette doctrine prĂ©suppose que l’absence de mixitĂ© sociale est un problĂšme exclusivement urbain section ci-aprĂšs. Elle comporte aussi deux biais mĂ©thodologiques elle prend la proportion de logements sociaux dans la commune comme indicateur de mixitĂ© sociale, sans se prĂ©occuper de la pertinence de la mesure Ă  cette Ă©chelle section suivante. Elle ne tient pas compte de l’hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© de la population du logement social, la seule prĂ©sence de logements sociaux n’est pas un indicateur pertinent de mixitĂ© sociale section d’aprĂšs. La mixitĂ© en ville et Ă  la campagne 29Le fondement implicite de la loi SRU fait du dĂ©ficit de solidaritĂ© un phĂ©nomĂšne spĂ©cifiquement urbain. Il faut donc imposer davantage de solidaritĂ© » dans les villes, mais les campagnes sont hors du champ de la loi, puisque le problĂšme ne s’y pose pas Blanc & Bidou, 2010. Ce prĂ©supposĂ© doit ĂȘtre questionnĂ© il y a sans doute des solidaritĂ©s Ă  l’intĂ©rieur des communautĂ©s villageoises, mais aussi des querelles de clocher ». Les nouveaux arrivants sont des intrus et l’opposition Established vs. Outsiders Elias & Scotson, [1965] joue Ă  plein. Les villageois sont particuliĂšrement allergiques Ă  la crĂ©ation de logements sociaux dans leur commune, de peur qu’elle n’entraĂźne l’arrivĂ©e des cas sociaux », rejetĂ©s par la ville. La mesure de la mixitĂ© sociale Ă  l’échelle communale 30Si la sĂ©grĂ©gation et la mixitĂ© sont prĂ©sentes dans les villes et les campagnes, elles prennent des formes diffĂ©rentes. Paradoxalement, la loi SRU ne s’applique que dans les agglomĂ©rations urbaines et elle raisonne pourtant comme si la France ne comportait que des petites communes rurales, qui seraient Ă  la fois une unitĂ© de la vie sociale et une unitĂ© administrative. Dans une ville grande et mĂȘme moyenne, 20 % de logements sociaux n’a pas grand sens en termes de sĂ©grĂ©gation et de mixitĂ© si on ne sait rien de la rĂ©partition intra-communale si les logements sociaux sont concentrĂ©s dans certains quartiers, alors que d’autres n’en comptent pas, la commune sera peut-ĂȘtre en rĂšgle avec la loi SRU, mais la mixitĂ© sociale sera faible. Il est curieux que cette objection Ă©lĂ©mentaire soit si largement nĂ©gligĂ©e. La diversitĂ© du logement social 31Dans le langage courant comme dans la loi SRU, le logement social est assimilĂ© Ă  celui des pauvres. La rĂ©alitĂ© est beaucoup plus nuancĂ©e et complexe, pour deux raisons essentielles tous les pauvres ne vivent pas dans le logement social et, inversement, le logement social n’hĂ©berge pas que des pauvres. C’est la principale limite de la mixitĂ© sociale par le statut d’occupation du logement tenure mix, en anglais il y a des riches et des pauvres, aussi bien chez les propriĂ©taires que les locataires Tunstall & Fenton, 2006. Historiquement, le logement social est nĂ© en France avec les habitations Ă  bon marchĂ© », suivies par les habitations Ă  loyer modĂ©rĂ© », les fameuses HLM Guerrand, 1966. Ces logements sont construits et gĂ©rĂ©s par des collectivitĂ©s territoriales communes et dĂ©partements ou par des organismes parapublics les ex-sociĂ©tĂ©s anonymes d’HLM, devenues Entreprises sociales de l’habitat. Ces organismes bĂ©nĂ©ficient de financements publics, ce qui leur permet de pratiquer des loyers modĂ©rĂ©s », c’est-Ă -dire infĂ©rieurs Ă  ceux du marchĂ©. Juridiquement, les logements sociaux sont rĂ©servĂ©s aux mĂ©nages aux ressources modestes ». 32Ce loyer, mĂȘme modĂ©rĂ©, est encore trop Ă©levĂ© pour les plus pauvres ils sont mal logĂ©s dans les taudis du secteur privĂ©, ce que l’on a appelĂ© le marchĂ© de l’insalubre » Rudder-Paurd & Vourc’h, 1978, ou encore le logement social de fait. Les dĂ©bats sur la mixitĂ© sociale et la loi SRU ne tiennent aucun compte des pauvres logĂ©s dans le secteur privĂ©, parce qu’ils ne peuvent accĂ©der au logement social. De plus, les organismes de logement social ne veulent pas loger exclusivement des pauvres. Ils ne veulent pas que logements sociaux » rime avec ghettos » et ils se prĂ©sentent comme des gĂ©nĂ©ralistes de l’habitat », en invoquant les bienfaits de la mixitĂ© sociale. 33Le logement social est segmentĂ©. Sous des appellations qui changent souvent, il y a une hiĂ©rarchie Ă  trois niveaux le logement social ordinaire », en-dessous le logement trĂšs social » et au-dessus le logement social intermĂ©diaire », ce qui veut dire entre le logement social et le marchĂ© libre. Lorsqu’elles ont Ă©tĂ© construites par des organismes de logement social, les citĂ©s universitaires sont considĂ©rĂ©es comme du logement social, mĂȘme la rĂ©sidence des Ă©lĂšves de la trĂšs prestigieuse École nationale d’administration ENA, en plein centre de Strasbourg. Ceci entraĂźne des niveaux de loyer diffĂ©rents, des plafonds de ressources diffĂ©rents et des listes d’attente diffĂ©rentes. C’est pourquoi le logement social a Ă©tĂ© accusĂ© de produire des sĂ©grĂ©gations sociales Barre, 1976. Mais la rĂ©forme du financement du logement social de 1977, qui a voulu a voulu favoriser la mixitĂ© par la mobilitĂ© des locataires, au moyen de l’aide personnalisĂ©e au logement, est dans une logique nĂ©o-libĂ©rale et elle n’a rien arrangĂ© Blanc, 2004b. Quand il y a des trĂšs pauvres dans le parc privĂ© et des classes moyennes dans le parc social, le pourcentage de logements sociaux est un instrument trĂšs grossier pour mesurer la mixitĂ© sociale. Les paradoxes de la mixitĂ© sociale 34Dans la thĂ©orie de la complexitĂ©, un paradoxe est une situation dans laquelle il faut satisfaire en mĂȘme temps deux injonctions opposĂ©es et d’égale valeur Morin, 1991. Ainsi la rĂ©novation urbaine vise Ă  disperser les pauvres, mais sans savoir oĂč les reloger, car personne ne veut les accueillir. MĂȘme Ă  dose homĂ©opathique, ils continuent Ă  dĂ©ranger et ils se retrouvent entre eux, souvent Ă  proximitĂ© section ci-aprĂšs. Par ailleurs, une mixitĂ© qui admet des exceptions n’est pas une vraie mixitĂ©. C’est pourtant ce qui se produit aux deux extrĂȘmes, avec l’exclusion des plus pauvres et l’auto-exclusion des plus riches section suivante. RĂ©novation-dĂ©molition, dispersion et re-concentration 35Pour contraindre Ă  la mixitĂ© sociale, la rĂ©novation urbaine dĂ©truit beaucoup de logements sociaux, mĂȘme en bon Ă©tat, en ne tenant aucun compte du fait que la plupart des intĂ©ressĂ©s voudrait rester dans leur quartier et mĂȘme conserver leur logement, avec des amĂ©liorations modestes. Il y a Ă  cela deux types de raisons, Ă©conomiques et affectives. Les pauvres sont rĂ©alistes ils savent que, si le logement est amĂ©liorĂ©, il sera nĂ©cessairement plus cher. Ils ne veulent pas prendre le risque de se retrouver Ă  la rue, faute de pouvoir payer le nouveau loyer. D’autre part, les pauvres sont attachĂ©s Ă  leur habitat et Ă  leur quartier parce qu’ils y ont leur famille et/ou leurs amis, leurs habitudes et, surtout, des rĂ©seaux d’entraide et de solidaritĂ© patiemment construits. DĂ©mĂ©nager dans un autre quartier, c’est se retrouver isolĂ© avant d’avoir reconstruit de nouveaux rĂ©seaux de solidaritĂ©, ce qui est beaucoup plus long que les rĂ©seaux sociaux » sur internet ! La rĂ©novation urbaine ne dĂ©truit pas seulement des immeubles, elle abolit un pan de la culture et de la vie sociale d’un quartier Coing, 1966. 36Ce saut dans l’inconnu est d’autant plus inacceptable que le relogement est habituellement mal prĂ©parĂ© les nouveaux logements prennent du retard, la stigmatisation par l’ancienne adresse crĂ©e des barriĂšres et les locataires redoutent le jugement nĂ©gatif de leurs futurs voisins. C’est aussi une Ă©preuve pour les autoritĂ©s locales et les bailleurs sociaux, mal prĂ©parĂ©s Ă  gĂ©rer ce genre de situation. Les contraintes bureaucratiques et financiĂšres sont telles que les locataires que l’on voulait disperser se retrouvent ensemble ! C’est le phĂ©nomĂšne de re-concentration, observĂ© notamment en Île-de-France LelĂ©vrier, 2010. Ce phĂ©nomĂšne n’a rien de nouveau observant la premiĂšre rĂ©novation urbaine Ă  Paris, menĂ©e par le Baron Haussmann sous le second Empire 1852-1870, Friedrich Engels 1957 [1887] notait la question du logement n’est pas rĂ©solue, [
] elle est seulement dĂ©placĂ©e ». Une mixitĂ© sociale limitĂ©e aux couches moyennes et petites-moyennes 37On peut distinguer deux types de communes laissant Ă  dĂ©sirer du point de vue de la mixitĂ© celles qui n’ont pas assez de logements sociaux et doivent en construire pour se mettre en conformitĂ© avec la loi les communes SRU », selon Didier Desponds, 2010 et celles qui en ont trop et cherchent Ă  en perdre, mĂȘme si elles n’y sont pas tenues par la loi les communes ANRU ». En Île-de-France, les communes ANRU sont d’anciennes communes ouvriĂšres de la banlieue rouge », dans lesquelles la proportion de classes moyennes a lĂ©gĂšrement augmentĂ©, via l’accession Ă  la propriĂ©tĂ© les opĂ©rations de rĂ©novation urbaine bĂ©nĂ©ficient davantage aux classes moyennes » Desponds, 2010, p. 55. Les classes moyennes sont aussi bĂ©nĂ©ficiaires dans l’attribution des logements sociaux, puisqu’on cherche Ă  les faire revenir pour Ă©viter de reconstituer des concentrations de pauvres, on avantage les candidats de classe moyenne, au dĂ©triment du principe de justice sociale. 38En Île-de-France, la sĂ©grĂ©gation augmente Ă  la fois dans les quartiers les plus riches et les plus pauvres. Entre les deux, c’est-Ă -dire dans la majoritĂ© des quartiers, la mixitĂ© augmente lĂ©gĂšrement ; mĂȘme dans les quartiers gentrifiĂ©s » PrĂ©teceille, 2006. Nouveau paradoxe, ce qui est normal » pour les riches, pratiquer l’entre-soi, est interdit aux pauvres, ce qui les fragilise. L’injonction Ă  la mixitĂ© sociale s’adresse surtout aux catĂ©gories intermĂ©diaires. Si le discours a changĂ©, la situation reste proche de celle du xixe siĂšcle, lorsque la petite bourgeoisie avait la mission » de vivre au milieu du peuple pour l’éduquer et le civiliser Guerrand, 1967. Mais la grande noblesse, comme la grande bourgeoisie, n’était pas concernĂ©e. 39Dans les quartiers en cours de gentrification, les gentrifieurs » les fameux bourgeois-bohĂȘmes peuvent toujours se rassurer en se disant que leur prĂ©sence est la cause de la mixitĂ© sociale » Charmes, 2005, p. 123, ce qui est en partie vrai, mais Ă  court terme seulement. Ils mettent en avant le mĂ©lange des nationalitĂ©s, mais cette mixitĂ© ethnico-sociale est beaucoup plus facile Ă  rĂ©aliser Ă  l’intĂ©rieur des mĂȘmes catĂ©gories aisĂ©es, qui valorisent le cosmopolitisme, qu’entre couches moyennes et couches populaires. Toutes origines ethniques et/ou nationales confondues, les pauvres sont les exclus de la gentrification. Les frontiĂšres de classe sont plus rĂ©sistantes que les frontiĂšres ethniques. 40Le paradigme de la transaction sociale est pertinent pour analyser une pratique sociale aussi paradoxale et ambiguĂ« que la mixitĂ© sociale. La section ci-aprĂšs retrace briĂšvement la formalisation de ce paradigme depuis l’ouvrage fondateur de Jean Remy, Liliane VoyĂ© et Emile Servais, Produire ou reproduire ? 1991 [1978]. Elle souligne d’abord trois facteurs qui font l’originalitĂ© de cette approche et qui s’appliquent bien Ă  la mixitĂ© sociale l’attention portĂ©e aux conflits, la place des accords informels et la combinaison de la confiance et de la mĂ©fiance. Elle interroge ensuite le statut de la transaction sociale c’est un paradigme heuristique, avec un but de connaissance ; faut-il aussi le considĂ©rer comme un paradigme pragmatique ? La rĂ©ponse provisoire est prudente. 41En revenant au conflit de dĂ©part, entre la libertĂ© de vivre entourĂ© de ses proches et l’égalitĂ© dans l’accĂšs Ă  un logement dĂ©cent, la section suivante montre que l’approche juridique, française mais aussi britannique, ne retient que le deuxiĂšme volet, en ignorant le premier. La conciliation de ces deux exigences passe par une dynamique transactionnelle, reconnaissant le rĂŽle dans la cohabitation des communautĂ©s ouvertes », fondĂ©es sur un projet commun. Le paradigme transactionnel 42L’ouvrage Produire ou reproduire ? a Ă©tĂ© dĂ©battu et approfondi collectivement, permettant une formalisation progressive du paradigme transactionnel Blanc et al., 1992 ; Freynet et al., 1998 ; Gibout et al., 2009 ; Maroy et al., 2009. La transaction sociale est d’abord un processus qui inclut de l’échange, au sens du don et du contre-don, de la nĂ©gociation pour parvenir Ă  des compromis de coexistence, mais sans prĂ©supposer la libertĂ© et l’égalitĂ© des partenaires la transaction peut passer par des phases de rapport de force et d’imposition section ci-aprĂšs. Faire de la transaction sociale un paradigme pragmatique lui fait courir des risques, mais ce n’est pas une raison suffisante pour l’écarter section suivante. Conflit, compromis, coopĂ©ration et confiance 43Le paradigme transactionnel s’inspire de la sociologie du conflit de Georg Simmel [1907]. La vie sociale est traversĂ©e et structurĂ©e par des couples d’opposition et en tension permanente, les partenaires Ă©tant Ă  la fois complĂ©mentaires et opposĂ©s le conflit des gĂ©nĂ©rations, la lutte des sexes ou celle des classes, mais aussi le conflit de la tradition et de la modernitĂ©, etc. Dans ces conflits irrĂ©ductibles, il faut faire son deuil d’une solution dĂ©finitive. Seul un compromis est envisageable et il ne peut ĂȘtre que prĂ©caire et provisoire. La thĂ©orie de la complexitĂ© du social d’Edgar Morin 1991 est une seconde source d’inspiration. Les couples d’opposition produisent des paradoxes qui renforcent la complexitĂ©. 44Le paradigme de la transaction sociale permet de comprendre comment des acteurs qui sont Ă  la fois partenaires et adversaires parviennent Ă  Ă©laborer les compromis qui leur permettent de coopĂ©rer. La coopĂ©ration suppose un minimum de confiance, mais on ne fait pas spontanĂ©ment confiance Ă  un adversaire. La logique juridique est souvent contre-productive car elle fait par principe abstraction de la confiance, considĂ©rant qu’un accord en bonne et due forme doit avoir prĂ©vu Ă  l’avance toutes les situations de rupture et d’échec de l’accord. MĂȘme si elles ne sont pas suffisantes et restent source de fragilitĂ©, les transactions informelles, implicites ou tacites sont souvent fĂ©condes et elles peuvent permettre des avancĂ©es qui seraient impossibles si elles Ă©taient officialisĂ©es. La dĂ©fiance ne disparaĂźt pas, mais la confiance se construit progressivement la transaction se caractĂ©rise comme ce mouvement paradoxal par lequel on Ă©tablit une reconnaissance impossible, ou l’on rĂ©tablit une reconnaissance rompue, ce qui revient d’une maniĂšre ou d’une autre Ă  nĂ©gocier ce qui n’est pas nĂ©gociable » Bourdin, 1996, p. 256-257. La connaissance et l’action 45Le paradigme de la transaction sociale a une fonction heuristique, dont le but est la connaissance intime du social, en combinant l’approche plus subjective de l’intĂ©rieur et l’approche plus objective de l’extĂ©rieur. Aujourd’hui, le dĂ©veloppement exponentiel de pratiques sociales faites de mĂ©diation et de transactions, dans les conflits du travail ou dans les conflits familiaux notamment, amĂšne Ă  se demander si le paradigme transactionnel a acquis une fonction pragmatique. Que l’approche par la transaction favorise le dĂ©veloppement de pratiques sociales innovantes, notamment en termes de gestion des conflits, serait une bonne chose. Mais les risques sont nombreux. Le premier serait d’établir une codification et un inventaire des bonnes pratiques transactionnelles », ce qui aurait deux inconvĂ©nients ce serait d’abord contradictoire avec l’idĂ©e d’expĂ©rimentation, de souplesse et d’adaptation au contexte ; ce serait aussi donner une valeur normative Ă  la transaction, ce qui pourrait par exemple dĂ©boucher sur la production de manuels de transaction sociale », Ă  l’usage de diverses professions, notamment pour les opĂ©rateurs de la mixitĂ© sociale dans l’urbanisme. Il y a de bonnes et de mauvaises transactions les Ă©changes commerciaux reprĂ©sentent des guerres potentielles pacifiquement rĂ©solues et les guerres sont l’issue de transactions malheureuses » Claude LĂ©vi-Strauss, citĂ© par Remy & VoyĂ©, 1981, p. 171. 46La polĂ©mique nĂ©e au QuĂ©bec sur les accommodements raisonnables », aprĂšs la mise en oeuvre des recommandations de la commission prĂ©sidĂ©e par GĂ©rard Bouchard et Charles Taylor 2008, est trĂšs instructive Ă  cet Ă©gard dans une sociĂ©tĂ© multiculturelle comme le QuĂ©bec, des rĂšgles qui font sens pour un groupe sont absurdes pour un autre. Pour rĂ©soudre ce problĂšme, on peut adopter une dĂ©marche proche de la recherche d’un compromis transactionnel et tolĂ©rer des assouplissements visant Ă  rendre la rĂšgle acceptable par tous. Ce principe a Ă©tĂ© adoptĂ© de façon consensuelle comme plein de bon sens. Pourtant, sa mise en Ɠuvre a provoquĂ© un tollĂ© ce qui Ă©tait raisonnable » pour les uns, par exemple la tolĂ©rance au port du voile dans l’espace public, Ă©tait totalement dĂ©raisonnable » pour les autres. C’est la fameuse question de qui jugera les juges ? » comment dĂ©cider de ce qui est raisonnable quand le conflit porte sur les valeurs qui sous-tendent la » rationalitĂ© ? MixitĂ© sociale, communautĂ© de projet et sociĂ©tĂ© 47Les partisans de la mixitĂ© sociale dĂ©noncent sans beaucoup de nuances un coupable tout trouvĂ© les communautĂ©s et le communautarisme ». Si la critique des communautĂ©s refermĂ©es sur elles-mĂȘmes se justifie pleinement, des communautĂ©s ouvertes » peuvent permettre de trouver une issue Ă  l’injonction paradoxale de la mixitĂ© sociale. CommunautĂ©s et sociĂ©tĂ©s 48Revenons sur le paradoxe de la premiĂšre section la loi française privilĂ©gie l’égalitĂ©, avec le droit Ă  un logement dĂ©cent ; mais elle fait passer au second plan la libertĂ© de vivre entourĂ© de ses proches. Vivre au milieu de voisins inconnus, avec lesquels il n’y a aucune affinitĂ©, est une perspective peu rĂ©jouissante. La mĂȘme logique est Ă  l’Ɠuvre en Grande-Bretagne, oĂč les villes gĂšrent une part importante du logement social. De nombreuses municipalitĂ©s ont mis en place un systĂšme de points pour attribuer leurs logements. Certaines accordaient des points supplĂ©mentaires aux enfants des rĂ©sidents du quartier en considĂ©rant que, si ces jeunes adultes voulaient rester dans le quartier de leur enfance, c’était une bonne chose pour leur insertion dans la communautĂ© de quartier. Par contre, les juges ont estimĂ© que, si l’intention Ă©tait louable, ce dispositif entrait en contradiction avec la loi contre la discrimination raciale et qu’il devait ĂȘtre aboli. En effet, cette prime Ă  l’anciennetĂ© » fait obstacle Ă  l’obtention d’un logement par les immigrants rĂ©cents Blanc, 2004a, p. 203. 49Le modĂšle implicite est une sociĂ©tĂ© constituĂ©e par des individus mobiles et sans aucune attache, ni Ă  des espaces, ni Ă  des personnes. C’est une sociĂ©tĂ© sans institutions intermĂ©diaires, ce qui est une vision trĂšs rĂ©ductrice de la complexitĂ© des sociĂ©tĂ©s. Une communautĂ© est un groupe intermĂ©diaire qui entretient des liens affectifs forts, produits par une histoire et une identitĂ© communes. Une communautĂ© peut ĂȘtre repliĂ©e sur elle-mĂȘme et fermĂ©e aux autres ; elle est alors incompatible avec la mixitĂ© sociale. Elle peut aussi ĂȘtre accueillante et ouverte, devenant alors une communautĂ© de projet Blanc, 2012. MixitĂ© sociale et communautĂ© de projet 50Une communautĂ© de projet est par dĂ©finition ouverte Ă  tous ceux qui adhĂšrent au projet, mĂȘme si le projet commun est trĂšs vite susceptible de lectures opposĂ©es Reynaud, 1989. Pour rester ouverte, une communautĂ© de projet doit ĂȘtre attentive Ă  faire Ă©voluer son projet dans le sens d’une plus grande ouverture, pour que la communautĂ© puisse s’élargir et se renouveler. La distinction entre communautĂ© ouverte et fermĂ©e est un type-idĂ©al toute communautĂ© est prise dans la tension entre l’ouverture et la fermeture. La tentation de l’ouverture peut donner le vertige en s’élargissant, la communautĂ© risque de renier ses valeurs fondatrices. C’est une piste permettant de concilier les apports de la vie communautaire et les exigences de la mixitĂ© sociale, en respectant l’entre-soi, mais en l’assortissant d’une plus grande ouverture Ă  l’environnement social. Conclusion inĂ©galitĂ©s et mixitĂ© sociale 51Il faut Ă©viter la confusion, aujourd’hui frĂ©quente, entre l’égalitĂ© et l’égalitĂ© des chances. Pour accĂ©der Ă  un emploi, une formation ou un logement, l’égalitĂ© des chances consiste Ă  placer tous les candidats sur la ligne de dĂ©part en veillant Ă  ce que le processus de sĂ©lection ne prenne en compte que les compĂ©tences de chacun. Cette dĂ©marche a le mĂ©rite de s’attaquer aux privilĂšges, rentes de situation et autres passe-droits. Elle rĂ©duit ainsi des inĂ©galitĂ©s flagrantes et choquantes. Mais l’égalitĂ© des chances ne produit pas de l’égalitĂ© certains sont pris, d’autres sont rejetĂ©s. Les inĂ©galitĂ©s persistent, mais elles deviennent lĂ©gitimes et supportables parce que fondĂ©es sur des critĂšres justes. L’égalitĂ© des chances peut paradoxalement renforcer les inĂ©galitĂ©s justes Bihr & Pfefferkorn, 2000. 52La mixitĂ© sociale est le refus du ghetto et de toute forme d’assignation Ă  rĂ©sidence ; elle rĂ©pond Ă  l’aspiration Ă  davantage de libertĂ© et de fraternitĂ©. Mais, dans sa contribution Ă  la rĂ©duction des inĂ©galitĂ©s spatiales, la mixitĂ© sociale doit aller bien au-delĂ  de l’égalitĂ© des chances dans l’accĂšs au logement social. Il ne suffit pas d’imposer la cohabitation sur un mĂȘme espace Ă  des catĂ©gories sociales hĂ©tĂ©rogĂšnes. Il faut aussi se soucier de la qualitĂ© des Ă©changes sociaux, ce qui est beaucoup plus difficile Ă  mettre en Ɠuvre et Ă  apprĂ©cier.
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comment les inégalités sociales portent atteinte à la cohésion sociale